Et les automobilistes se plaignaient. Pour pouvoir faire Lyon-Chambéry en 1 heure par l'autoroute, durée habituelle lorsque le trafic est fluide, il fallait franchir les tunnels avant 7 heures ou après 22 heures. Sinon, le trajet pouvait prendre 1 heure 30, voire plus de 2 heures. Inacceptable pestaient-ils ! Pendant ce temps, la durée du trajet par le chemin de fer allait de 1 heure 15 pour les meilleurs trains via Saint-André-le-Gaz à 1 heure 45 pour les plus lents via Culoz. Donc, même avec les travaux, le train n'était pas vraiment plus rapide que la voiture.  On peut certes dire que notre société est droguée à la vitesse pure et que finalement, on perd moins son temps en passant 1 heure 30 à lire ou à travailler dans le train, ce que je fais généralement, que 1 heure à conduire sa voiture.

Retournons cepedant un instant un peu plus de trente ans en arrière, avant l'ouverture de l'autoroute A43, en 1974.  Le trajet en voiture, par la RN6, mettait 2 heures à 2 heures 30. Les trains étaient à peine plus lents qu'aujourd'hui : 1 heure 30 à 1 heure 45. Mais leur vitesse relative était supérieure à celle de la voiture. L'autoroute Lyon-Chambéry, et en particulier la section entre le Guiers et la capitale savoyarde, avec ses deux tunnels, a représenté un investissement très élevé en faveur de l'automobile. Cet investissement a été complété en 1992, avec l'ouverture du deuxième tube du tunnel de l'Epine, dont le retour à un seul tube, pour causes de travaux, occasionne les perturbations que l'on sait. Pendant ce temps, ligne de chemin de fer n'a bénéficié que d'un investissement modeste en comparaison, l'électrification de la liaison via Saint-André-le-Gaz, en 1988, qui a permis aux trains les plus rapides de gagner quinze minutes. De ce fait, l'essentiel du trafic voyageur Lyon-Chambéry passe par l'autoroute et non par le train. J'ai même plusieurs fois entendu des personnes sensibilisées aux questions d'environnement me dire qu'elles laissaient leur voiture à un parking relais à l'est de Lyon, pour continuer en métro ou en tramway. Il ne leur était pas venu à l'idée de prendre le train.

Les travaux des tunnels des l'Epine et des Monts vont bientôt être achevés. Pendant ce temps, on peine à trouver le financement de la ligne TGV Lyon-Turin, sur laquelle des TER à grande vitesse pourraient relier Lyon à Chambéry en moins de 40 minutes. Rêvons un instant. Si, au début des années 1970, on avait amélioré la ligne Lyon - La Tour-du-Pin et créé une ligne nouvelle La Tour-du-Pin - Chambéry, avec un tunnel sous l'Epine, le trajet Lyon-Chambéry par le train serait descendu en dessous de 1 heure, voire de 45 minutes. Le trajet par la route serait resté de 2 heures. Et aujourd'hui, on remettrait à 2020 au plus tôt la réalisation de l'autoroute, faute de financement...